Criteres d'appreciation des epopees: Le cas d'une "pop" karakalpake

This article aims to identify the criteria by which the Karakalpak bards of Central Asia evaluate the performance of their epics. To do so, Frédéric Léotar analysed the vernacular terminology used in listening situations. First, the author played archive recordings of the most esteemed masters from the 1960s, but these did not give rise to detailed verbalization. Faced with this methodological obstacle, the researcher then decided to propose pieces played by novices, and specifically the pop rendition of part of a traditional epic. A number of terms and expressions referring to several key criteria of Karakalpak musical culture emerged from the commentaries first collected from a professional bard (G’ayrat O’temuratov), then confirmed by others. Paradoxically, the criteria, as they were felt and expressed by advocates of traditional Karakalpak epics, came out in a much more explicit way in response to the pop version than to the versions of reference. In this instance, the discussion around the modern version allowed for the revelation of aesthetic markers used by the most accomplished bards, specifically because this version was missing certain key elements of the traditional versions, the latter generally not eliciting detailed comments.Cet article est consacré à la mise en évidence des critères d’appréciation à partir desquels les bardes karakalpaks d’Asie centrale évaluent l’interprétation de leurs épopées. Pour ce faire, Frédéric Léotar s’est intéressé à la terminologie vernaculaire utilisée en situation d’écoute. Dans un premier temps, l’auteur a proposé des enregistrements d’archives réalisés auprès des maîtres les plus respectés durant les années 1960 et qui ne donnèrent pas lieu à une verbalisation détaillée. Devant cet écueil méthodologique, le chercheur décida alors de proposer des pièces jouées par des novices, et en particulier la version pop d’un extrait épique traditionnel. C’est ainsi qu’un certain nombre de termes et d’expressions renvoyant à plusieurs critères-clefs de la culture musicale karakalpake ont pu émerger des commentaires recueillis, d’abord auprès d’un barde professionnel (G’ayrat O’temuratov) puis confirmé par d’autres. De façon paradoxale, les critères d’appréciation tels que ressentis et exprimés par les tenants de la tradition épique karakalpake sont ressortis de façon beaucoup plus explicite d’une version pop que de versions de référence. Dans ce cas, le discours sur une version modernisée a permis de dévoiler les repères esthétiques sur lesquels s’appuient les bardes les plus accomplis, précisément car il manquait certains éléments clefs des versions traditionnelles, ces dernières ne donnant généralement pas lieu à une verbalisation aussi détaillée